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Trois mythes fondateurs d’Israël

jeudi 1er août 2019

Article de Robert Bibeau paru dans Les 7 du Québec

Trois mythes fondateurs ont servi à la droite et à la gauche politique occidentale pour implanter la base militaire israélienne au Moyen-Orient :

  1. le mythe du peuple et de la nation juifs.
  2. Le mythe des banquiers juifs asservissant le monde entier.
  3. Le mythe du lobby juif et d’Israël dirigeant l’Amérique.

Ces trois mythes sont intimement reliés et chacun est nécessaire à l’épanouissement des deux autres. Afin de défendre ses intérêts au Moyen-Orient, l’impérialisme britannique, sur les traces de l’impérialisme chrétien, eut l’idée d’accréditer le mensonge de l’existence d’un peuple « juif » à partir des reliquats d’anachorètes et d’adeptes de cette religion ésotérique essaimés sur le pourtour de la Méditerranée. La palme de la falsification historique revient à Lord Arthur Balfour, premier ministre britannique, qui proclama dans une lettre ouverte : « Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un Foyer national pour les Juifs. » [1] Le mythe de la « nation juive » venait d’être accrédité par l’homme politique le plus puissant de son temps. Les médias n’avaient qu’à suivre la voie tracée par l’impérialisme papale puis britannique.

La missive publique de Balfour était adressée à Lord Lionel Walter Rothschild, banquier d’un groupuscule sioniste britannique afin d’associer ce peuple mythique (et mystique) , cette nation nouvelle sortie tout droit des ghettos européens, à la haute finance abhorrée par les prolétaires spoliés. Un conflit de classe (capitalistes contre prolétaires) était ainsi transformé en un conflit racial très commode pour le grand capital international (juifs riches contre prolétaires pauvres, pendant que le reste de la bourgeoisie empoche les profits). Le deuxième mythe était né et venait accréditer le premier.

Le Parti national-socialiste (nazi) allemand, fit un bout de chemin sur ces thèmes éculés, avant que les partis politiques occidentaux de droite – prosionistes – et de gauche – antisionistes – prennent le relai. Leur affrontement complice donna naissance à l’État juif d’Israël qu’appuyait la gauche caritative : « donner une terre à un peuple sans terre » (sic) et que soutenait la droite soucieuse de : « donner un peuple à une terre sans peuple » (sic). En fait, gauche et droite occidentale, tout comme les bourgeoisies palestinienne et arabe venaient de consentir à la création d’une base militaire occidentale au Levant, dont la diaspora religieuse juive formera la chair à canon pour des décennies. Le troisième mythe était né accréditant et renforçant les deux précédents.

Seule ombre au tableau Yankee, le peuple palestinien, lui, existait vraiment, et occupait la terre de ses pères depuis des millénaires. La bourgeoisie nationale palestinienne a vite compris qu’elle ne pourrait récupérer ses terres, ses pouvoirs, sa rente foncière et ses profits qu’en se dotant d’un État palestinien « indépendant ». [2] Et ce fut le long martyre du peuple palestinien pour offrir un État national à sa bourgeoisie pourrie. Le peuple palestinien qui a eu le malheur de se trouver au mauvais endroit (sur les terrains expropriés pour construire la base militaire britannique, puis américaine au Levant) et au mauvais moment.

En 2019, voici comment Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah, résume la question israélienne : « Aujourd’hui, l’Israël subsiste seulement grâce au soutien et à la protection des États-Unis. Et si la Résistance se prépare suffisamment, même les États-Unis ne pourront pas traverser les mers et les océans pour défendre une entité dénuée de force intrinsèque […] Et entre parenthèses, les États-Unis ne travaillent pas pour Netanyahou, contrairement à ce que pensent beaucoup de personnes qui estiment qu’Israël dirige les États-Unis, mais je considère que c’est tout le contraire. Israël n’est qu’un instrument moyen-oriental, ou, si on utilise la terminologie de Son Éminence l’Imam Khamenei, un instrument ouest-asiatique, implanté par les États-Unis pour assurer leur hégémonie dans notre région et piller nos ressources en pétrole et en gaz. Trump ne travaille pas non plus pour Mohammad Ben Salmane (d’Arabie Saoudite) ni pour Mohammad Ben Zayed (des Émirats), il ne travaille pour personne. Trump ne considère que les intérêts des États-Unis. » [3]

Hassan Nasrallah est de son temps, celui du déclin de l’impérialisme américain, et le chef de la résistance libanaise comprend très bien que c’est la puissance de l’amphitryon qui fixe les paramètres de la conquête des terres et des ressources. Ce n’est jamais le vassal qui fixe les conditions de la guerre, mais son suzerain.

Comme tout chef politique nationaliste bourgeois, Trump travaille pour les intérêts de sa classe sociale – le grand capital américain. Dans la mesure où les capitaux israéliens sont liés aux capitaux américains et occidentaux (investissements croisés, échanges d’actifs, fusion d’entreprises, partage de contrats et de marchés, cooptation aux conseils d’administration) les deux entités se soutiennent mutuellement, mais pas au-delà de leurs intérêts rivaux. Afin de matérialiser cette assertion, prenons l’exemple du pétrole et du gaz naturel. Il fut un temps où le contrôle direct – colonial – de la ressource s’imposait afin d’en assurer l’exploitation, la distribution, la mise en marché et la collecte des profits. L’occupation militaire des puits de pétrole était alors nécessaire. Ce fut l’époque de l’implantation de dizaines de bases militaires américaines au Moyen-Orient et de la création de la plus grande base militaire occidentale : l’Israël.

Quand l’occupation militaire est devenue impossible, comme au Vietnam, en Corée, à Cuba, en Afghanistan, en Irak, au Yémen, au Soudan et en Iran, la bourgeoisie locale refusant de se plier aux désidératas américains, la guerre économique et diplomatique a été organisée : sanctions économiques, entraves aux marchés, campagne d’isolement diplomatique et de dénigrement médiatique, allant jusqu’au déclenchement de guerres civiles par des mercenaires terroristes comme en Libye et en Syrie.

Sous les conditions de la crise économique systémique du capitalisme, les puissances impérialistes américaine et occidentales ont de moins en moins d’intérêt à défendre leur base militaire israélienne au Levant et ces bourgeoisies aux abois aimeraient bien que le caporal Netanyahou baisse le ton et accepte la création d’un bantoustan palestinien emmuré en périphérie des propriétés spoliées. Ce serait alors le signal du désarrimage du bateau amiral occidental du rafiot israélien en perdition… ce que la despotique et cruelle bourgeoisie israélienne craint au plus haut point, d’où ses jérémiades pour maintenir en l’état les accords avec l’Autorité palestinienne fantomatique et fantoche.

Comme l’indique Hassan Nasrallah, il n’y a rien à attendre du dieu de la peste impérialiste américain ni pour le peuple palestinien, ni pour le peuple israélien implanté sur ces terres spoliées qu’il devra restituer après s’être débarrassé – tous les deux – de leur bourgeoisie nationale respective et des États fantoches qui les coiffent.


[2État indépendant dans les limites que consentent les puissances impérialistes occupantes.