Accueil > Actualités > Les prisonniers et prisonnières > Toulouse Bourse du Travail : 16 mai, rencontre avec Salah Hamouri

Toulouse Bourse du Travail : 16 mai, rencontre avec Salah Hamouri

jeudi 18 mai 2023, par marie

Toulouse, Bourse du Travail : 16 mai
Nous sommes deux cent personnes ce soir à la Bourse du Travail. Nous répondons à l’invitation de la CGT 31 d’écouter la parole de Monsieur Hamouri.

Monsieur Hamouri a été déporté de sa ville natale de Jérusalem, et il est en exil en France depuis décembre 2022. Il a raconté son histoire.Le bref résumé introductif a été interrompu par une dame qui était avec l’ancienne directrice du CRif départemental et élue, Madame Yardeni. Peut -être est-ce Madame Yardeni elle même qui s’est mise à crier, dès le début de l’intervention, sous prétexte qu’elle n’acceptait pas le mot "déporté" employé par Monsieur Hamouri ! Ses cris ont provoqué du brouhaha. Plusieurs dames,entourées de plusieurs hommes visiblement très à droite, voire à l’’extrême-droite, étaient visiblement venues pour semer des troubles à l’ordre public.

Monsieur Hamouri a poursuivi son témoignage, encouragé et soutenu par les participants.Il a donc été déporté en décembre 2022, après un énième séjour en détention administrative, et après que sa carte de résident de Jérusalem ait été révoquée sous prétexte de "défaut d’allégeance." Comment prêter allégeance à une force occupante ? Les Palestiniens arabes de Jérusalem n’ont pas de nationalité, ils obtiennent juste un permis de résider à Jérusalem et ce permis est révocable.

M. Hamouri a donc été déporté vers la France, directement de sa cellule, menotté, et envoyé manu militari à Paris.

Sa conférence était centrée sur Jérusalem et sur les prisonniers.

Israël utilise tous les moyens pour essayer de vider Jérusalem de ses habitants arabes : confiscation, colonisation, vols de maisons, lois d’allégeance, constructions d’infrastructures urbaines comme le tramway ou le périphérique qui vont empiéter sur les quartiers arabes, qui seront rasés.La construction du mur de l’Apartheid a mis 150 000 palestiniens hors des frontières historiques de la ville. L’objectif est de réduire le nombre d’Arabes dans la ville d’ici 2030 de plus de 60%.

En ce qui concerne les prisonniers politiques, la situation est tout simplement ubuesque et inhumaine.Rien ne justifie ce genre de traitements.4900 prisonniers politiques palestiniens sont enfermés dans des conditions inhumaines, dont 1000 détentions administratives, 160 enfants emprisonnés, 40 femmes, 1000 prisonniers malades 300 prisonniers enfermés depuis 20 ans, 40 depuis 25 ans, 17 depuis 30 ou 35 ans.

M. Hamouri a connu la détention dès l’âge de 16 ans en 2001, et la dernière fois en 2022 à l’âge de 37 ans. Les conditions sont déplorables et ont empirées. Tout est fait pour détruire les Palestiniens prisonniers et les rendre incapables de reprendre une vie normale après leur sortie. Les prisons israéliennes sont de l’autre côté de la ligne verte, ce qui rend difficiles toutes visites pour les familles des détenus, soumises aux checkpoints et à l’obtention de permis. Les visites sont très courtes et très strictes (14 ou 15 heures par an derrière un plexiglas, au téléphone) et les enfants ne peuvent pas recevoir de visites durant les premiers mois de leur détention.

La détention administrative date du mandat britannique. C’est un ordre militaire qui permet à l’armée israélienne de mettre en détention sans procès toute personne suspecte pour une durée de six mois, reconductible à l’infini sans autre forme de procès.Monsieur Hamouri a reçu trois ordres de détention administrative.Ces ordres sont basés sur une dossier de sécurité secret, ni l’avocat du prisonnier ni le prisonnier ne peuvent savoir pourquoi ils sont détenus.Un juge militaire garde les dossiers secrets. Ainsi,certains prisonniers sont en prison depuis 12 ou 13 ans, sans savoir pourquoi. 11 enfants sont détenus administrativement. Les plus jeunes ont 12 ans.

Les enfants dans les prisons israéliennes sont traités de la même façon que les adultes et jugés par des tribunaux militaires, il n’y a pas de tribunaux pour les enfants et tous leurs droits sont bafoués.Par exemple, les enfants ne peuvent pas continuer leur scolarité, ils ne peuvent pas recevoir de visites car les prisons sont hors de la ligne verte, et peu accessibles pour les familles, qui passent pas la croix rouge pour obtenir un permis. C’est très long,les enfants restent 3 mois sans contact avec leurs proches , ils sont isolés dans des sections que pour enfants et doivent gérer leurs vies tout seuls : imaginer 80 enfants seuls dans une section de l prison qui doivent se faire à manger, ranger, programmer leurs journées pour gérer le temps, sans aide des adultes. Tout est fait pour assassiner l’enfance de ces enfants.

Peut-être est-ce Madame Yardeni, qui porte plainte apparemment pour violences légères,(peut -être a -t-elle reçu la chaise lancée par un de ses accompagnateurs, ) ou l’un de ces amis, qui a dit : "S’il vous plaît, on aimerait savoir tout de même pourquoi ces enfants sont en prison, ça doit pas être pour rien.."

M. Hamouri venait d’expliquer longuement que ces enfants étaient en détention administrative, sans droits, sans procès, et un Français lambda ose lancer une provocation haineuse sur les droits inaliénables des enfants ! Là, j’avoue, j’ai eu honte ! honte d’être assise non loin de cette France là, de cette France haineuse et manipulable. J’ai crié "Palestine Vivra " pour ne pas pleurer, mais j’aurai pu tout aussi bien crier "Liberté, égalité , fraternité". Ces gens me font honte.

Le brouhaha a duré plusieurs minutes.

M. Hamouri a poursuivi.

Ces enfants sont maltraités et tout est fait pour assassiner leur enfance. L’un d’entre eux s’est fait tirer dessus pendant son arrestation, il a été torturé psychologiquement et physiquement pendant son interrogatoire, est à l’isolement depuis deux ans.Il n’a pas reçu de soins adaptés. Il est dans une cellule de deux mètres sur trois et ne peut sortir qu’une heure par jour. Les enfants , à Jérusalem aussi , subissent l’arrestation à domicile. Certains sont arrêtés quatre ou cinq fois par an.

Depuis 1967, 240 prisonniers malades sont morts dans les prisons ; ils ont été assassinés, torturés, ou ont subi la négligence médicale. "Ta fin est proche si tu tombe malade en prison" M. Hamouri cite en exemple un homme qui a développé un cancer en détention. Le médecin de la prison annonce qu’il lui reste 6 mois à vivre. Le prisonnier bénéficie d’une remise de peine car il va mourir. Mais voilà, au bout de six mois, il ne meurt pas. Alors, il est remis en prison ..

Cette année, trois prisonniers sont morts en prison, après des grèves de la faim. Un malade enfermé depuis 37 ans, avec un cancer, ne reçoit pas de soins adaptés. C’est une mort lente et cruelle.

M. Hamouri explique alors pourquoi on parle de négligence médicale, et pourquoi on parle de torture. Il prend l’exemple d’une prison qui est à la fois un lieu carcéral et une base militaire , dans le Negev, à la frontière égyptienne, au fond du désert .1800 prisonniers y sont détenus et une demande de visite chez le docteur peut durer des semaines. Dans la prison de Ramleh, qui comprend une clinique, il y a 60 places pour les malades et 40 places sont toujours prises. La direction de la clinique impose une négligence systématique et avérée.

La torture et la mort ne suffisent pas. Aujourd’hui, il y a des cas où les corps des prisonniers morts sont détenus jusqu’à à la fin de la détention dans des cimetières à numéros. La torture psychologique sur les familles et les proches qui ne peuvent enterrer leurs mort est une autre atteinte aux droits de l’homme. Treize prisonniers morts sont détenus aujourd’hui dans ces cimetières à numéro.

Une dame crie à l’attention de Salah que c’est lui qui est une torture. Le brouhaha reprend. Il semble que les opposants à la démocratie soient encore dans la salle...
Illustration 3
brouhaha
Illustration 4

Le transfert des prisonniers d’une prison à l’autre s’effectue dans des bus blindés de fer dans lequel les prisonniers, malades, femmes et enfants inclus, mains et pieds menottés restent parfois jusqu’à 15 heures d’affilée. Des malades en fauteuil, menottés eux aussi doivent être portés par les autres prisonniers. Ces transferts rendent le trajet inhumain, ce qui fait que de nombreux prisonniers malades ne demandent plus à être transférés dans les prisons où il y a une clinique.

M. Hamouri témoigne encore sur l’isolement dans les prisons et les tortures psychologiques induites. Les prisonniers ne parlent plus que de sujets superficiels avec les membres de leurs famille qui viennent leur rendre visite car ils ont peur des représailles. Les liens entre être chers se distendent au fil des années, ce qui peut créer des troubles familiaux et psychologiques.

Pendant les questions du public, un homme s’est faufilé jusqu’ à la tribune, a commencé à nous endormir avec une rhétorique mielleuse pour finalement s’en prendre physiquement à Salah Hamouri, en se précipitant violemment contre la table où celui-ci était assis. Encore des cris, de la violence et du brouhaha...

Pour conclure, Monsieur Hamouri nous dit qu’il lutte pour une cause,par pour une zone géographique. La cause palestinienne est la caque des droits de l’homme, des droits des enfants, des droits des peuples à l’autodétermination le droit de vivre dignement et de pouvoir garantir un avenir meilleur avenir pour les enfants. C’est une lutte, comme en Algérie, au Vietnam, en Afrique du Sud, pour la démocratie et le respect du droit international.
https://blogs.mediapart.fr/marie-ni...